Avec le BIM tout n’est pas rose, je vous rassure. Malgré mon enthousiasme je reste avant tout un grand pragmatique, très terre à terre et je ne crois que ce que je vois.
Pour garder la tête froide, faisons la balance avantages/inconvénients. Les avantages, nous les avons déjà vus :
- Minimisation des ressaisies et gains financiers associés,
- Réduction du coût global d’un bâtiment grâce à une meilleure conception,
- Efficacité améliorée lors de la conception et la synthèse,
- Erreurs minimisées lors de la conception, la synthèse et la construction,
- Simulations aisées lors de la conception et de la maintenance,
- Construction facilitée lors de la réalisation,
- Travail collaboratif permettant d’améliorer le dialogue entre intervenants et de décloisonner les métiers.
Maintenant, parlons des inconvénients. Ou plutôt, je vais parler de freins, car l’adoption du BIM se fera quoi qu’il arrive, mais cela va poser de nombreux problèmes qui vont jalonner toutes les étapes de la démocratisation du BIM à grande échelle. Je classe ces freins en 2 catégories.
- Premièrement : les conséquences liées à l’adoption du processus et les craintes ou réticences qu’elles occasionnent.
- Et secondement : les difficultés d’implémentation du BIM qui risquent de mettre à mal la crédibilité du processus et de mettre à mal son adoption.
Conséquences liées à l’adoption du BIM
Redéfinition de métiers
Une des premières réactions épidermiques qu’ont les gens lorsqu’on parle de BIM est de chercher leur place dans le processus. Chacun veut comprendre quel sera son rôle, comment vont évoluer ses missions. Tout le monde se sent déjà débordé par son travail, et c’est souvent vrai, ce qui fait que lorsqu’on évoque une évolution des missions, tout le monde interprète cela comme étant un ajout de travail.
Cette réaction est on ne peut plus normale. C’est bien ainsi que vont systématiquement les choses en entreprise : on « charge la mule » au maximum pour voir si elle continue de marcher, avant de se poser la question « d’acheter éventuellement une seconde mule ».
Vous avez donc raison de vous inquiéter : votre patron cherchera à vous faire absorber le BIM avant de se demander s’il recrutera ou non.
Maintenant, demandez-vous si votre métier va vraiment évoluer à cause du passage au BIM. En quoi concrètement vos fonctions seront modifiées ? Qu’est-ce que ces changements impliquent comme conséquences ?
Posez sur une feuille la liste des réponses à ces questions, et regardez à tête froide : honnêtement, il n’y a rien d’inhumain dans ces changements à venir. Oui votre métier va évoluer, plus ou moins en fonction du poste que vous occupez, mais dites-vous bien que c’est tout un secteur qui est concerné.
Regardez, vous êtes là-dedans :
Vous voyez ? Vous n’êtes pas tout seul à être concerné par le changement !
C’est tout un secteur qui doit se redéfinir. Et forcément un train aussi chargé va mettre du temps à démarrer, vous n’allez pas être plaqué à votre fauteuil !
Maintenant vous pouvez prendre trois décisions :
- Regarder le train passer en attendant le plus longtemps possible avant de sauter dedans, au risque de tomber sur les rails,
- Sauter dans le train, mais pas en premier on ne sait jamais, peut être que le train est piégé ?
- Ou sauter au plus proche des « locomotives », les leaders en matière de BIM, en vous documentant et vous formant à cette discipline – c’est déjà ce que vous faites en lisant ce livre, bravo !
Avez-vous déjà remarqué que la Première Classe est systématiquement au plus proche de la locomotive ?
Je ne vous dis pas qu’il faut occulter les conséquences que l’on va évoquer ci-après, mais soyez bien conscient que ce n’est pas en repoussant l’échéance que vous vous dispenserez de faire évoluer vos pratiques…
Investissements logiciels et formations lourds
Oui le BIM coûte cher. Très cher. Il faut de nouveaux logiciels, vendus une petite fortune à eux seuls, mais il faut aussi un ordinateur suffisamment puissant pour les faire fonctionner et surtout un salarié formé à cette tâche, et qu’il va peut-être même falloir recruter pour l’occasion si vous ne disposez pas en interne d’une ressource adéquate.
Mettons des chiffres valables à l’instant ou je les rédige :
- La suite Autodesk Building Suite Premium = Abonnement 250€ H.T. par mois
- Un PC Intel Core i7 16Go de RAM = Achat 1 400 € H.T.
- Une formation de 5 jours sur Revit = Achat 4 000 € H.T.
- Un salarié dédié à la tâche = de 2 300 € à 3 000 € bruts par mois
Ces chiffres correspondent à un environnement de travail « de base » auquel il vous faudra peut-être ajouter d’autres « logiciels métier » capable de travailler sur la base d’une maquette numérique.
Alors oui, les gouvernements de plusieurs pays dont la France perçoivent le BIM comme un moyen d’insuffler un air neuf dans un secteur en crise, en espérant ainsi miser sur l’avenir et le préparer aux défis futurs. C’est une bonne logique, mais qui comparée à la réalité du terrain parait bien nébuleuse.
Depuis 2008, le BTP est malmené, la trésorerie fond à vue d’œil et les entreprises s’essoufflent et mettent parfois même la clé sous la porte. La crise est durable, profonde, violente.
Alors la période ne semble évidemment pas être la mieux choisie pour demander aux entreprises de réaliser de lourds investissements. Une aide publique serait évidemment la bienvenue pour aider ces investissements, mais ce n’est ni à l’ordre du jour ni probable que cela le devienne.
Le BIM demande donc réellement de se jeter à l’eau sans trop regarder, c’est vrai. Et mis à part tenter de vous transmettre mon optimisme en la matière je ne peux pas faire grand-chose pour contrer l’argument économique.
Ce frein est une réalité qui va poser de gros problèmes pour démocratiser le BIM.
Ces freins vont rendre la transition vers le BIM très complexe…
Bonjour,
En qualité d’Economiste interne à une Direction Technique Maitre d’Ouvrage Délégué, j’ai fait, depuis 4 ans que je m’y intéresse, un peu le tour du potentiel certain, que peut apporter le BIM dans le quotidien de ma fonction et pour moi essentiellement que des avantages pour la Maitrise d’Ouvrage.
A 60 ans, J’ai 40 ans de métier et me suis adapter depuis 1980 à toutes les évolutions technologiques à commencer avec l’ancêtre du tableur « Visicalc ». A l’époque c’était certainement un investissement tout aussi conséquent que le BIM aujourd’hui (peu d’entreprises étaient équipées de PC)
J’ai le plein d’idées sur les possibilités d’économies que peut apporter le BIM pour un Maitre d’Ouvrage comme nous, en complément de ceux évoquées dans votre article..
A commencer par les Appels d’Offres ou toutes les quantités ne pourront plus être contestées, car factuelles et les variantes perceptibles dans le moindre €uro.
Les tableaux de surfaces des constructions, enfin légitimées à la fonction de chaque règle de calcules : SHOB, SHON, SPHON, GLA, Utiles, Habitables.
Pour ce qui nous concerne, comme propriétaire de patrimoine immobilier, les calculs des surfaces pour les déclarations des Taxes Foncières des constructions selon leurs affectations (avant 3 mois à partir de la DAT)
La prochaine étape c’est l’amortissement des ouvrages exécutés dans chaque corps d’état, plus facilement identifiable par la comptabilité numérique, gains de temps pour les saisies, moins d’erreurs dans la compréhension des affectations d’ouvrages BTP, équipements Informatique et matériel divers.
L’étape suivante c’est le désinvestissement des ouvrages déposés ou démolis, mieux identifiés, donc déduit du patrimoine immobilier.
Très aléatoirement faible avec les outils d’aujourd’hui ; toutes ces étapes sont biens dans la perspective des futurs niveaux du BIM et donc des économies potentielles importantes pour les résultats opérationnels de demain.
Bonjour, certes oui « ces freins vont rendre la transition complexe » … et surtout pour les petites entreprises sans véritable Bureau d’Etudes, à qui on va essayer d’imposer des productions Revit … Je crois aussi que la guerre des éditeurs et des formats rend aussi la chose difficile à appréhender …. On risque d’investir sur un mauvais cheval …